Pac-Man-AMI : Vers une meilleure compréhension de la stabilisation de la plaque induite par les anti-PCSK9. Cet article explore l'impact de l'Alirocumab sur la plaque d'athérosclérose, mettant en lumière les avancées de l'évaluation par des méthodes telles que l'IVUS, l'OCT et la spectroscopie NIRS.
Contexte
Les anti-PCSK9 constituent une drogue intéressante dans l’arsenal thérapeutique de la dyslipidémie qui reste encore un traitement de 2ème intention en cas d’échec des statines voire d’une bithérapie par statines et Ezetimibe et qui malheureusement reste largement sous-prescrite. Leur place dans la stratégie thérapeutique est encore sujet de discussion et de controverses et de nombreuses études restent nécessaire afin d’en confirmer les modalités. L’Alirocumab est un anticorps monoclonal de cette classe qui inhibe l’enzyme du PCSK9 impliquée dans le métabolisme hépatocytaire du cholestérol, permettant une diminution du LDL-cholestérol circulant avec un effet synergique au mode d’action des statines.
Par ailleurs, les mécanismes d’action des anti-PCSK9 ne sont pas encore complètement élucidés in vivo chez l’homme alors même que les méthodes d’évaluation de la plaque d’athérosclérose et en particulier endocoronaire sont de plus en plus performantes. Si l’échographie endocoronaire par IVUS est un examen-clé dans l’évaluation de la charge athéro-thrombotique endoluminale conduisant à une obstruction intraluminale, l’OCT permet une évaluation fine et précise de la chape fibreuse de la plaque d’athérosclérose au niveau le plus superficiel, tandis que la spectroscopie dans le proche infrarouge (NIRS ou Near InfraRed Rpectroscopy) se montre performante pour évaluer la stabilité de la plaque via un focus sur les dépôts lipidiques. Cette méthode spectroscopique est une méthode innovante d’évaluation de la vulnérabilité de la plaque grâce à un score, le Lipid Core Burden Index sur un segment de 4 mm, (maxLCBI4mm).
Ainsi, l’étude PACMAN-AMI est un essai contrôlé (par placebo), randomisé multicentrique qui vise à évaluer l’efficacité d’un traitement par Alirocumab introduit de de manière précoce dans la prise en charge du post-infarctus (STEMI ou NSTEMI) des patients revascularisés par angioplastie présentant au moins une lésion non coupable, non sténosante (20-50%) sur un critère de d’imagerie invasive endocoronaire.
Méthodologie
Au total, ce sont 300 patients qui ont été inclus de mai 2017 à octobre 2020 de manière multicentrique dans 9 hôpitaux européens pour être randomisé (1/1) afin de recevoir tous les quinze jours soit une injection sous-cutanée soit d’Alirocumab soit d’un placebo. Dans les deux cas, celle-ci était associée à une prise quotidienne de rosuvastatine à la dose de 20 mg. La particularité de cette étude est un déploiement du traitement par anti-PCSK9 en 1ère intention et de manière précoce dans les 24h suivant la revascularisation de la lésion coupable.
Il était prévu une évaluation endocoronaire multimodale complexe des lésions non coupables par IVUS, OCT et NIRS à baseline ainsi qu’à un an au cours du contrôle coronarographique systématique prévu.
Le critère de jugement principal utilisé était la diminution de la charge volumétrique en athérosclérose des lésions non coupables par IVUS à 1 an tandis que les critères de jugement secondaire d’imagerie évaluaient la vulnérabilité de la plaque par mesure spectroscopique NIRS de l’indicemaxLCBI4mmet la mesure de l’épaisseur minimale de la chape fibreuse par OCT. Des consultations de contrôle étaient prévues (à la 2ème, 4ème et 24ème semaine) ainsi que des appels téléphoniques (à la 8ème, 12ème,36ème et 48ème semaine).
Résultats
Sur le critère de jugement principal de sécurité, il n’a pas retrouvé de saignement majeur d’après la classification de l’ISTH dans le bras traité et 3 patients sur 250 dans le groupe asundexian 20 mg, un patient sur 250 dans le groupe asundexian 50 mg et 6 patients dans le groupe apixaban. L’analyse statistique montre une diminution de l’ordre de 50 % de la survenue de complications hémorragiques
Il y avait significativement moins de saignements dans le groupe asundexian comparativement au groupe apixaban d’environ 50 %, et ces résultats concordent peu importe la classification utilisé (TIMI, BARC).
Ce bénéfice est à mettre en lien avec une excellente tolérance sans qu’aucune différence significative n’est était relevé en ce qui concerne les effets secondaires entre les 2 groupes à l’exception de réactions allergiques à l’Alirocumab
De manière attendue, l’Alirocumab diminuait de manière significativement plus importante le taux de LDL-cholestérol (-84,8% vs -50,7%).
Discussion
Cette étude confirme les résultats de l’étude GLAGOV qui démontrait déjà que l’Evolocumab, un autre anti-PCK9 diminuait de la charge athéro-thrombotique en imagerie IVUS dans le cadre du syndrome coronarien chronique symptomatique. Cette fois l’étude PACMAN-AMI s’étend cette fois au domaine du post-infarctus avec une stratégie de mise en place des anti-PCK1 précoce et en 1ère intention en association avec un traitement intensif par statines et affine l’analyse endocoronaire puisque s’y ajoute les modalités d’OCT et de NIST.
Ces résultats confortent très largement la preuve du concept (Proof of Concept) puisque les anti-PCSK9 ont montré une aptitude à diminuer de manière plus efficiente le taux de LDL-cholestérol mais surtout montrent une véritable stabilisation (voire régression) de la plaque par des changements quantitatifs et qualitatifs sur la réduction des facteurs de vulnérabilité de plaque déjà documentée. Les 3 modalités d’imagerie endocoronaires concordent en effet vers une stabilisation (voire une régression) de la plaque avec une chape fibreuse plus épaisse, un cœur lipidique moins abondant et une réduction du pourcentage d’athérosclérose intraluminale de l’ordre de -1 %.
Cette diminution de -1 % en IVUS d’ailleurs concorde avec celle retrouvé dans les études GLAGOV et il avait émis déjà à l’époque la critique d’un effet certes significatif mais faible en termes de réduction de la charge athéro-thrombotique de la plaque. L’étude PACMAN-AMI semble illustrer que même si cet effet est faible, il s’intègre des dans un ensemble de modifications complexes et multidimensionnelles de la plaque qui ensemble participent à stabiliser celle-ci. Ainsi cette étude contribue à une meilleure compréhension du mécanisme des traitements de la dyslipidémie et documente un effet in vivo sur la progression de la plaque d’athérosclérose, celle-ci étant permise grâce au développement constant des techniques d’imagerie endocoronaires.
Toutefois, ces critères de jugement d’imagerie restent des critères intermédiaires de substitution« Surrogate »et cette étude reste complémentaire de l’étude les ODYSSEY OUTCOMES qui montrait déjà le bénéfice clinique de l’Alirocumab sur la survenue des évènements cardiovasculaires (-15% par rapport au groupe contrôle) chez une large série d’environ 19 000 patients introduit de manière moins précoce (entre 1 et 12 mois après) après la survenue d’un infarctus (STEMI / NSTEMI).
Conclusion
L’utilisation précoce de l’Alirocumab en traitement de 1èreligne et en association avec un statine forte dose montre un bénéfice physiopathologique sur la stabilisation de la plaque et apporte une meilleure compréhension du mécanisme d’action des inhibiteurs du PCSK9.
Article réalisé par Nabil Bouali – DES Médecine Cardiovasculaire CHU Poitiers