REVERSE-ITâŻ: Ă©valuation dâun antidote du TicagrĂ©lor (BriliqueÂź) dans un essai de phase 2b. Le TicagrĂ©lor, puissant inhibiteur plaquettaire, offre des avantages cliniques Ă©prouvĂ©s, mais son risque hĂ©morragique accru, sans antidote actuel, souligne la nĂ©cessitĂ© d'une solution rapide en cas d'urgence.
Contexte
Les antiagrĂ©gants plaquettaires oraux sont une classe pharmacologique utilisĂ©s de maniĂšre routiniĂšre en cardiologie. Leur mode dâaction passe par une inhibitionâŻplaquettaire du rĂ©cepteur P2Y12, inhibant ainsi ses principales voies dâactivation ciblant autres autre lâADP, le P2Y12, la thromboxane A2 et le rĂ©cepteur final de lâagrĂ©gation plaquettaire quâest la glycoprotĂ©ine a2b3. Le TicagrĂ©lor (BriliqueÂź) permet dâobtenir une inhibition plaquettaire puissante et rapide en bloquant le rĂ©cepteur P2Y12 normalement activĂ© par lâADP. Cela en fait lâune de molĂ©cules de choix dans le traitement du syndrome coronaire aigu, mais qui a Ă©galement des indications dans le syndrome coronarien chronique Ă haut risque, les urgences neurovasculaires (AIT et AVC), et dont les performances ont pu ĂȘtre dĂ©montrĂ© dans les essais PLATO, PEGAG, THEMIS et THALES. Â
Toutefois, ce bĂ©nĂ©fice clinique dĂ©montrĂ© est Ă mettre en lien avec un risque hĂ©morragique augmentĂ© en particulier lors de la rĂ©alisation de procĂ©dures invasives en urgences. Il nâexiste Ă ce jour pas dâantidote Ă cette molĂ©cule et la transfusion plaquettaire ne permet pas dâantagoniser lâaction du TicagrĂ©lor. Ainsi, un agent pouvant antagoniser rapidement lâaction de cette molĂ©cule pourrait prĂ©senter un bĂ©nĂ©fice important dans ces situations hĂ©morragiques ou Ă haut risque dâhĂ©morragie. Â
Lâobjectif de cette Ă©tude de phase 2B est dâĂ©valuer lâefficacitĂ© dâun nouvel anticorps monoclonal intraveineux, le Bentracimab. Le Bentracimab est un fragment dâanticorps recombinant humain de type IgG1 (le Fab) qui se fixe au TicagrĂ©lor libre avec une haute spĂ©cificitĂ© et une haute affinitĂ© ce qui lâempĂȘche de se fixer au rĂ©cepteur P2Y12 et permet donc lâaction normale de lâADP sur ceux-ci. Â
Méthodologie
Il sâagit dâune Ă©tude prospective multicentrique (Europe, AmĂ©rique du Nord) de phase 2b, contrĂŽlĂ© par placebo (ratio dĂ©sĂ©quilibrĂ© de 3/1), randomisĂ© et en double aveugle de volontaires sains entre 50 et 80 ans prĂ©traitĂ©s par une bithĂ©rapie associant de lâaspirine et du TicagrĂ©lor depuis 48 h. Le critĂšre dâĂ©valuation de lâefficacitĂ© Ă©tait le pourcentage dâinhibition du PRU (%) Ă 4 heures Ă©valuĂ©e Ă lâaide du test VerifyNow-P2Y12. Cet indicateur renseigne sur la rĂ©activitĂ© plaquettaire et sâexprime en en unitĂ©s de rĂ©action P2Y12 (PRU). Â
Résultats
Les rĂ©sultats principaux montrent une amĂ©lioration explosive de la fonction plaquettaire avec une diffĂ©rence significative entre les groupes. Ce rĂ©sultat sâobserve dĂšs la 1Ăšre heure, se maintient lors de lâĂ©valuation du critĂšre de jugement principal Ă 4h et semble commence Ă dĂ©croitre Ă partir de 20-24h. Â
Discussion
Lâeffectif utilisĂ© Ă©tait relativement modeste, et cette Ă©tude nâa pas Ă©té designé pour rĂ©pondre à  la question du bĂ©nĂ©fice clinique sur les Ă©vĂšnements hĂ©morragiques. Par ailleurs le profil de sĂ©curitĂ© en particulier de surcroit du risque thombotique doit ĂȘtre Ă©valuĂ© des effectifs bien plus larges. Â
Cette Ă©tude montre toutefois lâefficacitĂ© de cette molĂ©cule sur un critĂšre biologique quâest la fonction plaquettaire chez des volontaires sains.Â
Conclusion
Cette Ă©tude montre que le Bentracimab restaure de maniĂšre significative la fonction plaquettaire sans effets secondaires majeurs sur un petit effectif de volontaires sain, et si elle donne des arguments encourageants pour proposer un tel antagoniste du TicagrĂ©lor, dâautres Ă©tudes restent nĂ©cessaires et sont attendus chez des patients malades, avec un plus grand effectif et sur un critĂšre de jugement clinique avant de pouvoir prescrire cet antidote chez les patient traitĂ©s par DAPT et prĂ©sentant des hĂ©morragies ou des interventions (chirurgicales ou procĂ©durales) en urgence.
Article rĂ©alisĂ© par Nabil Bouali â DES MĂ©decine Cardiovasculaire CHU Poitiers