Hématologie

EHA 2023 – Actualités diverses

Auteur
AuteurDr Pierre-Edouard Debureaux
Date
Date31 juillet 2023
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EHA 2023 – Actualités diverses

Retrouvez de nouveaux résultats présentés lors du congrès 2023 de l'European Hematology Association, sur l'impact du microbiote sur la réponse aux CAR T-Cells, une étude de phase III EPO vs luspatercept, et une alternative aux saignées dans la polyglobulie de Vaquez.

Le microbiote a un impact sur la réponse aux CAR T-Cells 

Le Dr Marco Ruella a présenté des résultats sur l’impact du microbiote sur le devenir des patients ayant reçu des CAR T Cells. En premier lieu, il a initialement présenté l’impact de recevoir des antibiotiques et tout particulièrement des antibiotiques à large spectre (Tazocilline, Imipénem et Méropénem) dans le mois précédent la réalisation des CAR T-Cells (n=228). L’exposition à ces antibiotiques est associée à une survie globale diminuée chez les patients avec LAL ou lymphome. Dans le lymphome, cela est également associé à un sur-risque de CRS et ICANS. Dans l’analyse multivariée sur la survie globale, l’utilisation d’antibiotiques à large spectre était associée à une survie diminuée indépendant du PS et des LDH (reflet de la masse tumorale). Dans une analyse du microbiote (n=48), le taux de réponse complète à J100 était associé à certaines bactéries de la famille des Clostridia (résultats confirmés dans une étude collaborative USA-Israël-Allemande). Il a également présenté des modèles de souris ayant reçu des antibiotiques et des CAR T-Cells avec un impact de ces antibiotiques sur la réponse au CAR T-Cells dans un modèle de lymphome.

Au total, de façon similaire à d’autres immunothérapies comme les anti-PD1 dans le cancer solide, les perturbations de microbiote impactent le devenir des patients et des actions simples pourraient être proposées pour améliorer la survie des patients (réfléchir sur sa prescription d’antibiotiques, décalage de quelques jours des traitements si c’est possible). Des études prospectives et de modulation du microbiote chez l’humain sont nécessaires pour confirmer ces résultats prometteurs.

EPO versus luspatercept : phase III dans le syndrome myélodysplasique 

Les syndromes myélodysplasiques (SMD) de bas risque ont comme principale complication les cytopénies et leurs conséquences. Afin de limiter les transfusions, les agents stimulant l'érythropoïèse (ESA) sont le traitement standard actuel dans ce contexte mais ils sont associés à des réponses limitées et/ou transitoires. Le luspatercept a modifié récemment la prise en charge d’un sous type de SMD, le SMD avec sidéroblastes en couronne via le déblocage de la phase terminale de l’érythropoïèse. Cette molécule pourrait également être utile dans la prise en charge de l’anémie chez les patients atteints d’autres SMD et il a été testé dans une phase III présentée à la plénière du congrès de l’EHA. 

Dans cette étude, les patients atteints de SMD de bas risque naïf vis-à-vis des ESA ont été traités soit avec du luspatercept par voie sous-cutanée (SC) toutes les trois semaines, soit avec de l'érythropoïétine alfa administré par voie SC en hebdomadaire (bras contrôle), pendant au moins 24 semaines. L'objectif principal était l’indépendance transfusionnelle pendant au moins 12 semaines, avec une augmentation concomitante de l'hémoglobine d'au moins 1,5 g/dL.

Les résultats préliminaires ont montré que 59% des patients du bras luspatercept (n=178) ont atteint l’objectif principal versus 31% pour le bras ESA (n=178, p<0.001). Le luspatercept a également montré des améliorations significatives en termes de réponse érythroïde et a été bien toléré (principaux effets secondaires : asthénie, quelques diarrhées et HTA).

Les patients avec les mutations SF3B1 (fortement associé au SMD avec sidéroblastes en couronne), ASXL1, TET2, DNMT3A, EZH2, IDH2, et U2AF1 ont obtenu de meilleures réponses au luspatercept que dans le groupe ESA. Ces résultats ouvrent la voie à une nouvelle option thérapeutique pour les patients atteints de SMD à faible risque dépendant des transfusions sanguines. Le suivi de cette étude et l’analyse des caractéristiques des patients qui bénéficent le plus de ce traitement sera important à évaluer.

Une alternative aux saignées pour la polyglobulie de Vaquez 

Les saignées sont souvent utilisées pour traiter la polyglobulie de Vaquez (PV) en provoquant une carence en fer permettant la baisse de l’hématocrite. Elles peuvent parfois être difficiles à organiser selon le lieu de prise en charge et mal tolérées par les patients. Une alternative prometteuse est un médicament nommé rusfertide qui s’injecte par voie sous cutanée a été présenté au congrès de l’EHA. Ce médicament, un mimétique de l’hepcidine, va réduire la disponibilité du fer via l’inhibition de la ferroportine. Dans l'étude REVIVE, l'effet de la rusfertide par rapport à un placebo a été évalué chez des patients atteints de PV nécessitant des saignées régulières.

Sur les 53 sujets atteints de PV randomisés (26 rusfertide et 27 placebo), le taux de réponse était de 69 % pour la rusfertide, contre 19 % pour le placebo (p=0,0003) avec une efficacité équivalente chez les patients sous saignée seule (p=0,02) et ceux sous saignée + cytoréducteur (p=0,02). Vingt-quatre des vingt-six patients sous rusfertide n’ont pas eu de saignée sur la période. Les scores de qualité de vie se sont améliorés dans le bras rusfertide par rapport au placebo sur l’asthénie, et le prurit aquagénique par exemple. Le traitement par rusfertide était généralement bien toléré (83 % grade 1-2 [réaction au point d’injection], 17 % grade 3 et aucun cas de grade 4 ou 5). Les résultats suggèrent que le traitement par rusfertide pourrait être une alternative prometteuse aux saignées pour le traitement de la polyglobulie de Vaquez dans certains contextes.

Cependant, des études supplémentaires seront nécessaires pour évaluer l'effet à long terme de ce traitement sur les complications cardio-vasculaires, thrombotiques et également voir l’effet sur le risque d’évolution de la maladie. Des essais de phase III sont en cours de recrutement pour répondre à ces questions et évaluer l'utilisation à long terme de la rusfertide chez les patients atteints de PV.

Article réalisé par le Dr Pierre-Edouard Debureaux, Interne en hématologie, Responsable Partenaires et ancien Président de l’Association des Internes en Hématologie (AIH).

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